Il est devenu un acteur très dynamique dans la sphère de l’agroécologie. L’ancien journaliste devenu agriculteur ne fait que répandre cette pratique agricole dans le monde paysan. Jérémie Gadah, puisqu’il s’agit de lui, milite en faveur de la restauration des sols à travers l’agroécologie dans la préfecture de l’Avé, plus précisément à Kuvé-Adékpé, à environ 6 km de Kévé et à environ 60km Nord-Ouest de Lomé. Togotopnews partage avec vous le parcours du promoteur de l’académie paysanne « Nénonéné ».
Même s’il est passionné par l’élevage depuis les bancs, Jérémie n’a jamais imaginé devenir agriculteur. Certes, sa passion pour les émissions télévisées mettant en lumière le monde paysan est grande.
Déjà à six ans, il s’était familiarisé avec l’élevage malgré le fait qu’il a grandi à Lomé. Depuis le cours primaire, le promoteur de l’académie paysanne Nénonéné était fan d’une émission sur la Télévision togolaise qui exposait bien le monde paysan ‘’Carnet rural’’. « Il ne parlait que du monde paysan. Je pouvais dire que c’est de là que la graine a été semée », s’est-il rappelé en souriant. A partir de cette émission, le jeune avait plus tendance à regarder les documentaires ayant trait à l’environnement et faisant focus sur la vie paysanne.
Devenu journaliste après son parcours en sociologie à l’Université de Lomé, M. Gadah avait tendance à côtoyer les agriculteurs. Chaque fois qu’il traversait une localité, ce professionnel des médias consacrait un peu de temps à des échanges avec des paysans et rédigeait quelques articles sur le secteur. Malheureusement pour lui, sa rédaction n’avait pas de page ni de rubrique agricole. « En ce moment, entre 2010 et 2016, l’actualité était plus marquée par la vie politique et les articles orientés vers le social notamment l’agriculture n’intéressaient pas vraiment la plupart des rédactions », a-t-il raconté.
En 2016, il était parti au Bénin pour se faire former durant quelques mois en techniques de maraîchage à l’Unité d’horticulture et de génétique logée à la Faculté des sciences agronomiques de l’Université d’Abomey-Calavi. L’idée de départ, c’était de se perfectionner pour mieux rédiger les articles sur les sujets agricoles.
C’est en goûtant à ce pan du monde paysan que Jérémie va finalement prendre goût. A son retour, après un an de travail, le jeune va démissionner du journalisme en 2017 pour poursuivre avec une autre formation d’un an au Centre de formation à l’entrepreneuriat rural à Avétonou. Le grand déclic viendra d’un documentaire « Les moissons du futur » de Marie-Monique Robin diffusé sur la chaîne Eden TV et suivi par Jérémie. Et la nature faisant bien les choses, au cours de son stage de fin de formation à Avétonou, il est tombé sur la version écrite du documentaire qui comporte beaucoup de détails. L’idée de trouver alors une référence en termes de pratiques agricoles commençait à tarauder son esprit. L’agroécologie sera finalement retenue après une autre séance de renforcement des capacités au Centre international de développement agropastoral (CIDAP) à Niamtougou. Il se lance définitivement le 1er octobre 2018.
Le choix de Kévé pour s’installer n’est pas un hasard. Son papa détenait un vaste domaine inexploité acquis depuis 1992 à cet endroit. Une terre argileuse présentant un aspect de vallée. A son arrivée, se rappelle-t-il, il n’y avait pas de voies pour y accéder, pas de voisins, jusqu’à aujourd’hui où ça fait presque 5 ans. « Nos premiers voisins se trouvent à presque 1,5km d’ici. Nous sommes dans une forêt vaste. Au début, il n’y avait pas d’électricité, il n’y avait rien, nous n’avons que deux torches à pile avec lesquelles il faut évoluer sans oublier l’accès difficile à l’eau », s’est-il rappelé. Celui qui est né et a grandi à Lomé doit désormais s’adapter à un nouveau monde. « Ce n’était pas du tout facile au début mais ce qui nous avait maintenus, c’était l’objectif. Comme c’est un domaine qui est vierge, s’installer directement et pratiquer l’agroécologie, composer avec la nature, c’est ce que je voulais. C’était pratiquement ce qu’il y avait dans le documentaire, c’est l’endroit parfait pour moi. », a-t-il raconté.
Aujourd’hui, le jeune a acquis une certaine stabilité et profite progressivement des fruits de son entreprise avec sa petite famille. « Les trois dernières années ont été les meilleures. Même en plein confinement, nous rempilons bien », a-t-il commenté. Il est actuellement Secrétaire général de la Coordination régionale des organisations paysannes et des producteurs agricoles (CROPPA), et du Réseau des jeunes producteurs et professionnels agricoles du Togo. Il a bénéficié en 2022 d’une formation sur les pratiques agroécologiques et de restauration des paysages forestiers financée par le Mécanisme Forêt et Paysan (FFF).
Des conseils de Jérémie aux passionnés de l’agriculture
Selon le promoteur de l’académie paysanne Nénonéné, pour devenir agriculteur aujourd’hui, il faut une formation, de la patience et de l’abnégation. L’agriculture, souligne le journaliste reconverti en agriculteur, a dépassé le stade de la subsistance. « C’est devenu un métier. Les saisons ne se maîtrisent plus. N’est plus agriculteur qui veut mais qui peut l’être. Si tu ne connais pas les maladies qui peuvent attaquer tes plants, tu ne peux pas être agriculteur ; tu peux beau travailler, mettre les grands investissements mais tu vas toujours tourner à perte. C’est tout un complexe de background qu’il faut avoir avant de se lancer dans le métier de l’agriculture et pouvoir en vivre décemment », conseille l’entrepreneur agricole.
Atha ASSAN