Aujourd’hui le terrorisme s’impose comme un véritable fléau auquel les États tentent de trouver des réponses idoines. L’une des pistes de solution, selon M. Seyni Oumarou, Président de l’Assemblée nationale du Niger est de « repenser toute la politique relative à la jeunesse ». Il s’exprimait à la Conférence parlementaire de Haut niveau de lutte contre le Terrorisme sur l’engagement des Jeunes qui a lieu à Lomé les 18 et 19 Janvier 2023.
Pour le Représentant de la Présidence du Comité interparlementaire du G5 Sahel, la jeunesse est un facteur important à prendre en compte dans la lutte contre le terrorisme.
« Ceux qui portent les armes contre nos compatriotes sont des individus à la fleur de l’âge. S’ils ne sont pas à l’origine du phénomène, ils en sont le bras armé. Dès lors, la solution ne consiste-t-elle pas à leur opposer leurs semblables, bien préparés à les combattre ? », se demande M. Seyni Oumarou qui pense qu’il est aussi nécessaire de s’interroger sur le cheminement qui conduit les jeunes aux graves extrémités auxquelles ils sont arrivés.
Parlant de ce qui pousse les jeunes à s’adonner aux actes terroristes, le président de l’Assemblée du Niger affirme que beaucoup de paramètres entrent en ligne de compte notamment les défaillances devenues structurelles de l’éducation formelle, surtout en milieu rural ; l’exacerbation de la pauvreté dont découle le développement rapide du chômage des jeunes, aggravée par l’inadéquation entre le croît démographique et celui de l’économie et la masse des jeunes sans emploi continue à s’accroître avec le risque pour ces jeunes de devenir sujets à toutes les dérives préjudiciables à l’ordre public.
Le parlementaire précise que bien évidemment, tous les jeunes ne deviennent pas des terroristes, ni des délinquants mais, ils demeurent les cibles de toutes les organisations criminelles qui s’adonnent aux trafics illégaux d’armes, de substances psychotropes, de personnes humaines.
« Ainsi, en zone rurale, il a été observé que les recrues des terroristes sont principalement constituées de jeunes désœuvrés, appâtés par de fausses promesses d’un enrichissement immédiat, avec en prime la bénédiction de Dieu !» rapporte M. Seyni Oumarou qui souligne que face à cette situation, il revient « aux pouvoirs publics de repenser toute la politique relative à la jeunesse ».
L’approche stratégique d’après son analyse, devra tenir compte des nouveaux paramètres comme l’important virage des mentalités induit par la profusion des Technologies de l’Information et de la Communication.
Il indique à cet effet que la meilleure façon de responsabiliser les jeunes face au terrorisme est d’abord de les préparer mieux à résister aux chants de sirènes des réseaux terroristes qui s’en servent comme des chairs à canon.
Selon lui, il faudrait que, par une meilleure prise en charge, la jeunesse trouve la force psychologique nécessaire pour se positionner en adversaire résolu du terrorisme et puisse ainsi contribuer à faire échec à ses commanditaires.
« Il nous faut donc aujourd’hui proposer aux jeunes de vraies alternatives, en les impliquant à tous les niveaux. À cet égard, l’expérience nigérienne, reposant sur la création d’un Conseil national de la Jeunesse, peut faire école. En effet, les jeunes, fédérés à travers ce conseil se sentent davantage considérés et responsabilisés sur toutes les questions les concernant. Ce conseil a aujourd’hui acquis suffisamment de visibilité pour devenir progressivement l’interlocuteur aussi bien écouté par le Gouvernement que par l’Assemblée nationale pour toutes les problématiques se rapportant à la jeunesse », explique M. Seyni Oumarou.
Agir en amont
En plus de ce cadre organisé, pour faire des jeunes de meilleurs acteurs, le Président de l’Assemblée nationale du Niger propose de doter les populations des moyens d’assurer aux enfants une éducation adaptée aux besoins des sociétés.
« Il sera certainement nécessaire de revisiter tous les curricula scolaires avec un recentrage sur nos réalités économiques et sociales. Sans doute, sera-t-il indispensable de passer par l’orientation précoce de l’essentiel des écoliers vers la formation professionnelle et réserver l’accès aux études supérieurs aux meilleurs élèves par génération », recommande-t-il.
Pour les déscolarisés et les jeunes ruraux, M. Seyni Oumarou exhorte que des investissements massifs soient faits pour développer davantage des filières d’entrepreneuriat adaptées à leur condition, avec vocation à réduire l’inactivité et donc la vulnérabilité de la jeunesse. L’objectif, ce faisant, est de réduire les conditions qui conduisent les jeunes au désespoir qui les pousse à des extrémités fâcheuses pour leurs communautés et pour l’État.
D’après lui, l’autre action immédiate qui pourrait concourir à faire de la jeunesse un paravent contre le terrorisme, consiste à incorporer aux Forces de Défense et de Sécurité des jeunes résidant aux abords de la ligne de front. Une expérience qui selon lui s’est révélée concluante au Niger, face à BOKO HARAM, dans la région de Diffa.
Hélène DOUBIDJI