Dans le cadre de la modernisation de la justice togolaise et d’adaptation au contexte sécuritaire de l’heure, les députés ont adopté à l’unanimité ce 27 décembre 2022 deux projets de loi en lien avec la justice militaire. Il s’agit notamment du texte portant modification de la loi n°2016-008 du 21 avril 2016 portant nouveau Code de justice militaire et du projet de loi portant statut des magistrats et auxiliaires des juridictions militaires. Au cours du débat général, nombreuses ont été les inquiétudes soulevées par les parlementaires auxquelles le président de la Commission des lois et le ministre de la justice ont apporté des éclaircissements.
A partir de l’année 2023 et avec l’opérationnalisation des nouveaux textes, à infraction militaire, justice militaire. Cependant pour y arriver de nombreux obstacles doivent être franchis, ce qui justifie certaines préoccupations des députés lors de l’étude des projets de loi en séance plénière.
Gerry Taama demandait à savoir si la mise en place et l’opérationnalisation des tribunaux militaires ne risquerait pas d’augmenter les recours habituels et remettre en cause la fameuse loi de la discipline au sein de l’armée. Legzim Balouki, elle de son côté, s’est souciée de l’influence que pourrait avoir la hiérarchie sur le processus. Innocent Kagbara, pour sa part, est préoccupé par l’indépendance de cette juridiction vis-à-vis du ministère de la défense vu qu’elle est composée des magistrats de droits communs et des magistrats militaires.
Répondant aux préoccupations de l’Assemblée, le président de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale, Tchitchao Tchalim, a précisé que les juridictions militaires ne sont saisies que pour des infractions militaires cités dans le texte comme, entre autres, « la désertion à l’intérieur, la désertion à l’étranger, la désertion à bande armée, la provocation à la désertion, du recèle, des pillages, des destructions ; de l’usurpation de l’uniforme, de décoration, de signes de distinctions et d’emblème ; d’outrage à la Cour, d’incitation à commettre des actes contraires au devoir, de l’insubordination, de la révolte et du refus d’obéissance ». Il n’y a que dans ces cadres, a-t-il souligné, « qu’on peut saisir une juridiction militaire sinon on sera irrecevable ». En ce qui concerne la garantie, le Président de la Commission des lois rassure que « les deux textes portent toutes les garanties pour que le magistrat soit totalement indépendant ». A propos de l’influence de la hiérarchie, il souligne : « Il sont des militaires mais ils sont sous le conseil supérieur de la magistrature ».
Prenant la parole à la suite du président de la Commission, Pius Kokouvi Agbétomey, garde des sceaux, ministre de la justice a été clair : « Les mêmes règles qui s’appliquent aux magistrats des juridictions de droits communs vont s’appliquer aux magistrats militaires ». Un magistrat militaire, a-t-il poursuivi, doit connaître ses obligations et les assurer. « C’est à lui d’essayer de rendre la justice selon la loi et sa conscience. Il n’y a pas d’autres garanties qu’il faut apporter, les textes sont les garanties. La loi est bonne, pourvu qu’on en fasse un usage légitime », a commenté le ministre. Par ailleurs, Pius Agbetomey a souligné que l’existence de juridictions militaires n’enlève pas aux juridictions de droits communs leur prérogative. « Ce qui veut dire tout simplement qu’un militaire qui a été escroqué par un autre militaire n’irait pas saisir le parquet militaire », a-t-il illustré.
Une autre préoccupation soulevée par l’Assemblée est le financement du processus, soulevée par l’honorable Djossou Sémondji qui a demandé à savoir si les crédits budgétaires étaient prévus à cet effet. « Si c’est de l’urgence absolue, nous solliciterons un collectif », a répondu le président de la Commission des lois.
Le vote de ces deux lois, en effet, conforte le gouvernement dans ses efforts de modernisation de la justice.
Selon la présidente de l’Assemblée nationale, Yawa Tsègan, « la séance plénière a permis de franchir une étape additionnelle et décisive pour la mise en œuvre de la loi portant nouveau code de justice militaire adoptée en 2016 ».
L’organisation des juridictions militaires conformément aux principes constitutionnels est régie par la loi n° 2016-008 du 21 avril 2016 portant nouveau code de justice militaire, une résultante de la refonte de la loi n° 81-005 du 30 mars 1981 portant code de justice militaire.
Atha ASSAN